Les partenaires sénégalais et l’approche par les droits
23 mai 2018
Que signifie l’approche par les droits dans des projets de renforcement de la société civile et de promotion de l’agro-écologie ? C’est la question que s’est posée Fanny Polet avec les partenaires sénégalais lors de sa mission en tant que coordinatrice du programme qui lie Solidagro avec KIYO et G3W-M3M. Elle nous fait part des fruits de leur réflexion et partage son expérience qui lui a permis d’en apprendre davantage sur travail quotidien des organisations partenaires avec la population de la région de Fatick.
Photo: Participants aux ateliers sur l’approche par les droits.
ELS et le CNCR
Solidagro travaille avec deux organisations partenaires au Sénégal : ELS (Eglise luthérienne du Sénégal) et le CNCR (Conseil national de concertation et de coopération des ruraux).
ELS travaille avec 6 animateurs dans la ville de Sokone. Ils sont actifs dans 25 villages situés dans 3 communes différentes sur les volets suivants : le renforcement des associations de paysans, l’alphabétisation, le soutien à l’utilisation de techniques agro-écologiques et la promotion de l’accès à l’eau, l’hygiène et l’assainissement dans les écoles.
Le CNCR est une fédération paysanne nationale bien ancrée dans la région de Fatick. Leur expertise dans le domaine foncier et du plaidoyer leur permet de soutenir les paysans de cette région.
Photo : Mor Fall, le coordinateur de ELS à Sokone (accroupi) explique une technique d’évaluation aux femmes de la fédération de Toubacouta. Il me confiait : « Je fais ce métier par amour du rural ».
Des droits plutôt que des besoins
Le fait de rendre des services aux populations (réaménager un puits, distribuer des semences ou des vaccins contre la maladie de Newcastle, par exemple) est vu comme une porte d’entrée pour l’atteinte des détenteurs de droits et pas comme une fin en soi. Cela permet de les atteindre, mais également de consolider le partenariat avec les autorités locales et surtout, de renforcer leur assise sociétale.
Photo : L’animateur de ELS spécialisé dans les techniques agro-écologiques passe régulièrement sur les exploitations pour conseiller et soutenir les femmes.
L’importance de l’analyse
En parlant du sujet de l’accès au foncier, les participants ont décrit les différentes parties prenantes. D’un côté, les porteurs d’obligations (ceux qui sont là pour que les droits soient respectés, garantis et réalisés) : les chefs de village, les propriétaires terriens, les chefs coutumiers et religieux, la communauté locale, les autorités administratives. De l’autre, les groupes cibles : les groupements villageois, les unions, les fédérations, les jeunes, les associations sportives et culturelles, … Selon leur analyse, ils pourraient mieux impliquer les élus locaux, d’une part et, d’autre part, mieux engager la société civile dans leur travail quotidien avec les bénéficiaires. En attirant, par exemple, des intellectuels qui pourraient mieux documenter les causes des problèmes auxquels la population fait fasse quotidiennement.
Photo : Une participante présente les bonnes pratiques partagées au sein de son groupe par rapport à leur manière d’entrer en interaction avec les porteurs de devoirs.
Le rôle de l’Etat
Dans le cadre de la campagne de Newcastle que mènent les partenaires, ceux-ci se sont rendus auprès du maire de leur commune accompagnés par certains bénéficiaires pour que les services et structures mis en place par le projet soient totalement intégrés dans le processus d’éradication de cette maladie (qui touche les volailles). Cela a porté ses fruits, les autorités communales vont activement y participer.
Au Sénégal, les hommes et les femmes sont en principe égaux. Mais pour que ce principe soit bien appliqué dans les faits, il faut que la loi soit vulgarisée et diffusée au sein de la population. Les participants proposaient que soient instaurés des « points focaux genre » pour veiller au respect de ces lois.
L’empowerment et la mobilisation
Les partenaires peuvent compter sur un tissu associatif local très collaboratif. Les formations qu’ils donnent aux leaders en techniques de négociations et de leadership par exemple permettent à ces derniers d’être plus efficaces et plus pertinents.
Les partenaires ont la capacité d’organiser de grandes mobilisations sociales, mais ils partageaient le fait qu’il faudrait qu’ils fassent plus attention au suivi de ces grandes actions. Pour cela, ils vont mettre le focus sur leur communication, tant interne qu’externe.
Photo: Les membres de la fédération des femmes de Touboucata.
Conclusion
Les partenaires ont été très intéressés de participer à ces ateliers. L’approche par les droits leur a paru plus accessible et, grâce au fait qu’ils ont discuté des principes de cette approche sur la base de leurs expériences quotidiennes, la réorientation de leurs activités dans cette approche leur parait maintenant tout à fait réalisable.